Lancée en juin dernier par le président de la République, la réforme du prélèvement à la source pose de nombreuses questions pratiques pour les contribuables. Le ministre des Finances, Michel Sapin, et le secrétaire d’Etat au Budget, Christian Eckert, ont présenté mercredi matin les grandes lignes de la réforme, qui sera présentée en Conseil des ministres en juin et mise en œuvre en 2018. Voici les premiers détails :
Qui sera concerné ?
La réforme s’applique aux salariés, comme aux retraités et aux indépendants pour le paiement de l’impôt sur le revenu. Les salaires, les revenus de remplacement (retraite, chômage, maternité, etc.) et les revenus fonciers seront concernés. Les revenus des capitaux mobiliers et les plus values immobilières ne rentrent pas dans ce champ car ils sont déjà prélevés à la source.
Comment sera prélevé l’impôt ?
Pour les salariés, le revenu sera prélevé par les employeurs. L’impôt versé apparaîtra sur la fiche de paie comme c’est le cas aujourd’hui pour les cotisations sociales. De même, le prélèvement se fera auprès des caisses de retraite pour les retraités. La principale différence par rapport au prélèvement mensuel actuel est que les versements seront contemporains des revenus et qu’il y aura douze versements au lieu de dix.
Les indépendants verseront un acompte mensuel ou trimestriel, calculé en fonction de leurs revenus des mois précédents, et ajusté ensuite selon leurs revenus effectifs. S’ils anticipent une forte baisse de leurs revenus, ils pourront signaler leur situation à l’administration fiscale. Cette possibilité répond par exemple aux besoins des artisans qui perdent un gros clients, ou des agriculteurs soumis aux aléas climatiques. Les revenus fonciers se verront appliquer le même système d’acompte.
Comment sera fixé le taux ?
L’administration fiscale transmettra au contribuable et à l’employeur un taux de prélèvement au deuxième semestre 2017. Ce taux sera actualisé en septembre 2018, suite à la déclaration d’impôts remplie au printemps 2018. Il faudra donc continuer de déclarer les revenus chaque année. Quand les revenus varieront, l’impôt sera ajusté automatiquement. En cas de changement de situation ou de naissance d’un enfant, le contribuable pourra demander une mise à jour en cours d’année.
Les couples pourront également choisir la répartition de leur impôt : s’ils ont un écart de revenu important, ils pourront demander à avoir un taux différencié. « Il n’est pas question de modifier le quotient, qu’il s’agisse de familialisation ou de conjugalisation. L’impôt continuera à être calculé au niveau du foyer fiscal », a rappelé Michel Sapin.
Qu’en est-il des crédits d’impôts ?
Tous les crédits d’impôts dont la dépense a été engagée en 2017 seront conservés. Il reste à savoir si les dépenses engagées en 2018 pourront donner lieu à une déduction d’impôts dès cette année-là, ou bien en 2019. Mais cette question n’est pas encore tranchée. Il pourrait y avoir un traitement différencié pour les crédits d’impôts récurrents comme la garde d’enfants, et ceux qui sont ponctuels tels que les travaux de rénovation énergétique.
Quel sera l’impact sur les finances de l’État ?
« Pour le budget de l’Etat, il n’y aura ni année blanche, ni année double », a déclaré Christian Eckert. En revanche, les recettes de l’impôt sur le revenu deviendront moins prévisibles dans l’établissement chaque année du budget de l’Etat, puisqu’elles ne seront plus calculée en année n+1 comme c’est le cas aujourd’hui.
Pour éviter des difficultés de recouvrement de l’impôt lorsqu’une entreprise fait faillite, l’Etat sera considéré comme un créancier privilégié au tribunal de commerce comme c’est déjà le cas aujourd’hui pour les cotisations sociales.
Quelles conséquences pour les entreprises ?
L’impôt sera prélevé par les entreprises mais l’administration fiscale restera l’interlocuteur du contribuable. C’est elle qui calculera le taux et qui le communiquera à l’employeur. A Bercy, on réfléchit à tester le prélèvement à la source chez un panel d’entreprises avant l’entrée en vigueur de la réforme.
Les ministres ont voulu rassurer sur la confidentialité des données transmises à l’employeur. « 90 % des contribuables ont un taux d’imposition compris entre 0 et 10 %. Un même taux peut recouvrir des situations très différentes », défend Christian Eckert.
Quel est le calendrier ?
Le ministère des Finances va maintenant mener des consultations avec les partenaires sociaux. La réforme sera présentée en Conseil des ministres en juin puis débattue au Parlement en juillet. A l’été 2017, les contribuables recevront le taux de prélèvement à la source et pourront alors opter pour un taux individualisé. Au 1er janvier 2018, l’impôt sera directement prélevé sur la fiche de paie.